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dimanche 30 mars 2014

ANNA LOGON - À LA RECHERCHE DE LA PORTE PERDUE - PIANO VOIX






Interprétation au piano et texte écrit par Anna Logon. 

 Mise en voix par Emecka 




Frédéric Chopin - Prélude Opus 28 No.4 – « Suffocation »
(Par Anna)






 À la recherche de la porte perdue



Un vent frileux traînait ses plaintes lugubres sous un ciel cendreux suffoquant ses ouates pleurnichardes. La futaie déjà se contractait. Le chemin s’étranglait là, bâillonné de ronces ténébreuses s’enflant sur les souches. Combien avaient fait bien avant demi-tour ?... Combien auraient renoncé ?... Pourtant l’intuition me força à poursuivre inexorablement, quitte à engloutir le reste de mon âme et mon peu de raison. Mon regard s’échouait misérablement sur les troncs se dressant face à moi tels mille titans dévorés d’un lierre millénaire. Les branches les plus basses dépliaient leurs doigts menaçants, repoussant toute ombre aventureuse. Les ramures empoignaient ma chemise, les épineuses broussailles cramponnaient mes pas. Mes mains tendues dans les noirceurs se déchiraient aveugles sur des spectres tourmentés. M’enfonçant plus profond dans ces sombres entrailles, le silence me taisait sa propre terreur, l’air s’enfuyait oppressé. Ignorant le pain et l’eau, je marchais depuis des jours peut-être... des mois assurément... Mon esprit s’embrumait dépouillé de tout repère. M’égarant dans ces limbes funestes, je tombais lourdement sur mes genoux découragés. J’allais ainsi pourrir dans l’opacité de la nuit. L’humidité des bois aurait fini par me figer les sangs s’il n’avait diffusé ce singulier parfum terreux de troncs charnus et de fistulines. Alors, mes poumons en lambeaux se gorgèrent de ces dernières bouffées, derniers sursauts frissonnants tel l’humus porteur d’immortalité redonnant courage.



Les yeux clos guidés par la seule voix d’un désir fébrile, je repris ma quête. Errance chancelante, pavée de meurtrissures autant que de chimères. Existait-il vraiment ce jardin tant rêvé ? Où la tiédeur de l’air joue entre les bras chatoyants d’une onde nourricière... Où la sérénité se moque de tous les temps... Où le plus infime grain ignore même l’ivraie... L’infini du chemin amenuisait mes espérances... Soudain, il m’apparut, ce jardin enchanteur. Pourtant à l’abandon, il s’annonçait féerique. La grille de l’entrée était délicatement ciselée. Je la croyais perdue, je n’osais plus respirer. Dieu qu’elle m’était belle dans ses dentelles de rouille. Doucement, je caressais à peine du bout des doigts les volutes subtiles, frôlais la sculpture d’impériales fleurs de lys enluminées de roses de Damas. Alors prudemment, j’osais glisser cette clé gardée si précieusement au fond de ma passion. Le fermoir se refusait... Je m’interdis alors d’insister. Criantes de fragilité, ses froides crapaudines supportaient à peine les années de tourments et de solitude, suppliant seulement le repos et la paix. Je m’assis devant le petit mur couvert de mousse, enserrais mes jambes repliées dans mes bras, la clé dissimulée au creux d’une main. Après s’être longuement abreuvé de cette sérénité inaccessible, mes paupières se cicatrisèrent pour l’éternité.



Ami voyageur... Si le hasard guide tes pas vers ce magnifique jardin... Peut-être verras-tu sur le devant un vieil arbre mort aux branches rabougries, affectueusement penché sur la grille ouvragée, protégeant ce morceau de paradis de ses orages aux vents futurs.




Anna – 28 Février 2014 ©




2 commentaires:

  1. Réponses
    1. Bises à toi Anna et merci de ce texte surtout ! Captivant et mystérieux... Peut-être un voyage vers la sagesse...

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