Le mot du jour

Qui suis-je?


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mardi 11 mars 2014

Marcel Faure - 0006 à 0010 de La danse des jours et des mots




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Mercredi 28 septembre 2011 

Mon corps porte tellement de JE. Pendant que des nuages moutonnent sous mon lit, je laisse au présent le temps de mûrir. Qui sortira du chapeau aujourd'hui ? L'optimiste, le pessimiste, l'incandescent ou ce dormeur absent (1) que j'affiche le plus souvent.
Dehors, la ville bougonne et rote. Pourtant, de l'autre côté de la rue, il y a la mer, enfin, pas tout de suite. Il faut quand même faire trois ou quatre cents kilomètres pour l'apercevoir. La rue est étroite, ce qui réduit d'autant la distance pour l'atteindre.
Des hirondelles fleurissent un fil télégraphique. Partir ... et rester là, pour une tasse de café à boire avec Lloydia. Ailleurs ... sans bouger d'ici, et présent corps et âme avec toi. Je ne suis qu'une mouche et je tourne inlassablement autour du même pot de miel qui jamais ne se vide.

(1) Ce dormeur absent est une allusion à Nadja d'André Breton, qui écrit à propos de Robert Desnos " : il "dort", mais il écrit, il parle. ..."



Jeudi 29 septembre 2011

Ce "JE" qui vient de faire les courses du ménage, je le range dans un tiroir. Place au butinage. Cette fleur que la brise déshabille, je la réchauffe de mes yeux. Oscillation permanente du réel et de l'imaginaire ... Là-bas dans ce pré à flanc de colline. Matinée givrée d'un début d'automne qui chante la mélancolie jaune et rouille des premières feuilles en pleine métamorphose. Mélancolie ou vieillesse flamboyante ?
Bientôt à son zénith, le soleil bourdonne comme un fou avec quelques abeilles à la recherche d'un dessert pour l'hiver. Notre ruche à nous ne s'arrête jamais de piller la terre et, lorsque la terre se gratte, nous invoquons la fatalité.
Voilà que le tiroir du "NOUS" déborde. De l'insecte écrasé par mégarde, comme du couteau de l'assassin je me sens complice. À trop vouloir me taire, j'ai du sang sur les mains. Est-ce mon souffle ... est-ce la brise ... qui dénude la rose. Et je m'en vais léger de la beauté des choses.



Vendredi 30 septembre 2011 

Dans le jardin public de la place Anatole France, cuivre et or les feuilles d'automne, ... petite monnaie que les arbres prodiguent, ... jonchent le sol. Plonger ses pas dans ce bruissement si particulier qui ne ressemble qu'à lui-même. Bientôt la terre digèrera la parure d'été des arbres.
Cet avenir d'humus les indiffère. Jouir jusqu'à la fin de la lumière. Celles qui, encore vertes, s'accrochent, le savent bien. Battues et rebattues par des vents irascibles, privées de chlorophylle comme de sève, elles résistent pour l'ultime beauté soufrée qui les emportera.

Les enfants sont à l'école. Un pigeon solitaire se désole de l'absence de miettes. Et je suis là, indélicat, à marcher sur ce tapis sublime, rien que pour le plaisir d'entendre le bruit de mes pas.

J'entends comme un murmure qui m'appelle. J'aimerais m'allonger sur ce matelas qui craque et se froisse. Qui me verrait ? La rue est si loin et les gens si pressés ... j'hésite ... Je n'ose pas. Je pose bêtement mes fesses sur un banc et, maigre consolation, j'écris quelques mots qui sentent la saison.



Samedi 1er octobre 2011 

Si je tiens la distance, cela serait peut-être amusant de casser l'ordre chronologique du journal pour, par exemple regrouper ensemble tous les samedis d'un même mois. Un kaléidoscope primesautier aux couleurs ruisselantes qui ferait dire de moi : il a un petit vélo. Et je pourrais écrire, comme Christian Bobin, un certain Mardi 1er octobre, "Toutes les vies me semblent plus réelles que la mienne."
C'était en 1996 ce mardi-là. Je travaillais encore. Ma vie entre parenthèses et quelques instants volés sur le coin d'un bureau.

Un bourdon vibre contre la vitre de ma fenêtre. Je le libère.



Dimanche 2 octobre 2011 

Vous êtes invités chez nous. Gentiment vous offrez à Lloydia un bouquet de fleurs. Grave erreur. Immédiatement elle disparaît dans la cuisine, farfouille dans ses vases pour trouver le plus adapté, étale le bouquet sur la table et le refait tranquillement. Pendant ce temps, je rame pour entretenir la conversation et vous fais remarquer sournoisement qu'elle ne vous a toujours pas dit merci. J'occupe le terrain en servant l'apéritif. La voici enfin, triomphante.
— Merci, merci, mille fois merci, il est superbe votre bouquet ... fallait pas ...
C'est vrai qu'elles sont magnifiques vos fleurs, toutes fraîches cueillies de votre jardin. Elles embaument déjà le salon, mais je ne sais plus où mettre les bouteilles d'apéros. J'avais réussi à capter votre attention. Maintenant il n'y en a plus que pour elles, pour elle. Je suis jaloux.
La prochaine fois, venez avec des gâteaux. Lloydia comprendra très vite pourquoi je ne grignote pas quelques amandes avec vous. Votre gâteau, vous n'aurez pas l'occasion d'y goûter. Mangé avant d'arriver sur la table.

Ah, il est au citron ! Je déteste.




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