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mardi 23 septembre 2014

MARCEL FAURE - 0141 à 0145 de La danse des jours et des mots





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Jeudi 9 février 2012 

Je ne suis pas préparé à cette intrusion de souvenirs anciens qui viennent télescoper le présent. J'ai recherché en vain, une vieille photographie en noir et blanc de mon père, histoire de vérifier. Peine perdue.
Vanessa P., interrogée à la télé, n'avait pourtant fait que confirmer toute la distance qui nous sépare. Pourtant cette poupée de mode me fascine. Il en est ainsi de certains êtres qui nous captivent par leur beauté, leur voix ou ce qu'ils écrivent. Ils sont très différents de notre univers, ils peuvent avoir des idées aussi diamétralement opposées que Sollers, d'Ormesson ou Bobin. Cette sympathie irraisonnée peut nous surprendre au coin d'une rue en croisant un inconnu, associer un couple comme Montant et Signoret, s'attacher encore à un Lino Ventura, même lorsqu'il joue les brutes épaisses dans des films de seconde zone.
Pourquoi eux ? Pourquoi Emmanuelle Béart aussi. Evidemment, vous pourriez me reprocher une attirance sexuelle bien compréhensible envers ces magnifiques actrices. Mais non. Homme ou femme, lorsqu'ils parlent, lorsque je les lis, c'est à la fois une sensation d'apaisement et d'exaltation et, depuis que j'en ai pris conscience, une volonté de résistance.
Je ne résiste pas très longtemps. Heureusement, ils sont peu nombreux dans mon panthéon. Et trop inaccessibles ou morts, pour avoir une influence réelle sur ma vie.
Papa, les racines que tu m'as données sont solides. La vie simple et souriante, c'est peut-être cela que tu confiais à Vanessa P. dans un rêve, au bout de la rue des Deux Amis.



Vendredi 10 février 2012 

- Madame, je n'entends plus aboyer votre chien, vous avez trouvé une solution ?
Cet animal prénommé Délivrance par ses maîtres, nous bourrait les tympans de sa solitude plusieurs fois par semaine, surtout le soir, comme s'il avait peur du noir. Nous en étions arrivés à proposer de le garder chaque fois qu'il était seul et le gentil mastodonte n'était pas contre, à condition qu'il puisse, sans réserve, sentiner notre entre cuisses. Pourquoi s'en offusquer, c'est sommes toutes, une façon assez banale de se saluer chez la gente canine.
- Oh oui, cher monsieur, on allume la télé, il s'installe dans le fauteuil, cette compagnie lui convient.
- Et quelle chaîne lui mettez-vous ?
- TF1
- Vous êtes dure avec lui !



Samedi 11 février 2012 

Battements du sang dans mes tempes.
Archipels de nuages dans le ciel.
L'aube donne peu à peu de l'épaisseur au jour.
Je flotte au-dessus d'un café noir.
J'aime les matins qui palpitent dans mes veines.
Dehors le temps claque de froid.
La glace s'applique à lustrer la chaussée.
C'est un moment précaire, rare, évident.
Pendant une seconde,
Je suis le seul survivant d'un monde disparu.



Dimanche 12 février 2012 

Comment naît un poème ? Un battement de sang à mes tempes ? Une alchimie qui me dépasse. Peut-être la force d'inertie du premier vers ou cette fissure dans nos pensées. Des mots s'élèvent par densité jusqu'à la surface des choses. Un coup d'épuisette, le poème est fait.
Rythme, pulsation, respiration, mais aussi refuge d'où je regarde la réalité pour mieux l'affronter. Je fais le compte de mes réserves. J'erre, air, aire, ère, pauvre hère, comme un jeune hère je me frotte le front contre un tronc imaginaire pour que me pousse plus vite les bois que j'espère. Alors je fais des gammes sur mon piano dictionnaire.



Lundi 13 février 2012 

Tu es partout présente. Chaque objet, ici, c'est toi qui l'as choisi. Les livres aussi. Ta crainte, ton désespoir : ne plus pouvoir lire. Et c'est arrivé. D'abord sur l'œil où tu voyais le plus, puis l'autre. Cette tache au milieu qui t'a volée une partie de ta vie.
Gamine déjà tu lisais beaucoup. Une passion qu'adulte tu as voulu faire partager. Avec ton amie vous avez créé une bibliothèque pour enfants dans cette commune de la Loire, le seul chef-lieu de canton qui n'avait pas d'école publique dans le bourg. De petits moyens, mais un choix réfléchi qui fait de l'ombre au maire et conseiller général chargé de la culture à l'assemblée départementale.
Les chars russes dans notre commune. Oui, oui, dans les années 80 on osait encore dire cela dans nos campagnes, mais pas l'écrire. La rumeur plus puissante que l'armée rouge ... et peu à peu le mur de Berlin autour de la bibliothèque qui était pourtant dans des locaux municipaux. "Les barbelés de la culture", vous connaissez ? C'est lui, c'est le titre de son livre.
L'activité s'est poursuivie pendant trois-quatre ans. Les lecteurs, maintenant adultes, abordent encore Lloydia pour dire leur plaisir. La plus acharnée d'entre eux a eu un jour cette expression avec elle " tu es ma maman intellectuelle".
Lloydia lit à nouveau beaucoup, plus avec ses yeux mais avec ses oreilles. Jamais nous ne remercierons assez les donneurs de voix pour ce plaisir intense de rentrer dans une histoire romanesque, rêver sur un poème, se documenter sur un sujet... Et puis, en tordant ses yeux dans tous les sens, en s'aidant du télé agrandisseur, elle arrive tant bien que mal à décoder quelques phrases.
Même dans la nuit la plus noire, nous arriverons toujours à capter des instants de lumière. En chacun de nous, sommeille une luciole, il suffit de la réveiller.







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